La part commune (fiche de lecture)

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Repenser les règles de propriété

[À par­tir de là, c’est juste mes notes per­so géné­rales recom­pi­lées. C’est pas des notes réécrites avec le bou­quin sous la main, page par page, comme pour le reste. Donc c’est pas d’aus­si bonne qua­li­té que supra. Si jamais j’ai le cou­rage, je reli­rais le cha­pitre et recom­po­se­rait ça proprement]

La pro­prié­té est sou­vent pen­sée comme pro­fon­dé­ment liée à la liber­té indi­vi­duelle ou à la liber­té de mar­ché. La pro­prié­té pro­té­ge­rait ou fon­de­rait ces liber­tés. En réa­li­té, la pro­prié­té peut tout aus­si bien leur nuire, lors­qu’il y a des inéga­li­tés. [Le contrôle abso­lu du pro­prié­taire sur ses biens peut deve­nir une forte limi­ta­tion de la liber­té des autres, si cer­tains pos­sèdent beau­coup plus que tous les autres].

Il faut recon­naître que la pro­prié­té struc­ture et par­ti­cipe à l’exis­tence de rap­ports de pou­voir au sein de la socié­té (p.127). Elle est biface, en ce qu’elle peut être éman­ci­pa­trice ou asser­vis­sante. (exemples)

[Crétois men­tionne des théo­ri­ciens qui ima­ginent une socié­té où tout le monde est pro­prié­taire, la ques­tion de la répar­ti­tion des richesses compte et on peut ima­gi­ner socié­té plus juste sans renon­cer la pro­prié­té pour beaucoup]

L’égalité de droit per­met la fic­tion d’un pro­prié­taire des moyens de pro­duc­tions qui serait sur le même plan que celui qui vend sa force de tra­vail à ce pro­prié­taire (Marx). [Mais en réa­li­té, la pro­prié­té orga­nise la domi­na­tion hié­rar­chique des uns sur les autres].

Une dissolution de la propriété

L’évolution du capi­ta­lisme pour­rait tou­te­fois don­ner l’im­pres­sion que la pro­prié­té s’est dis­soute. On constate une cer­taine sépa­ra­tion entre la pro­prié­té et le contrôle, avec d’un côté l’ac­tion­naire (pro­prié­taire qui n’a­git pas) et de l’autre le PDG (sala­rié qui contrôle opé­ra­tion­nel­le­ment l’entreprise). 

[De même la frag­men­ta­tion des action­naires, où des petits action­naires ont un titre de pro­prié­té, mais aucun pou­voir réel, pour­rait aller dans ce sens]. Crétois évoque éga­le­ment la com­plexi­té des situa­tions actuelles, où un sala­rié (fut-il domi­né et en bas de l’é­chelle, comme un cais­sier) peut aus­si être action­naire… et donc en théo­rie en haut de la pyramide.

Mais contre l’i­dée d’une dis­so­lu­tion de la pro­prié­té, Crétois objecte que les action­naires, après un mou­ve­ment de récu­pé­ra­tion de leur pou­voir dans les années 80, conservent un cer­tain contrôle. [Ils votent des orien­ta­tions qui servent de feuille de route au PDG et peuvent le démettre si besoin].

Droits réels et droits personnels

En droit on sépare les droits réels, qui portent sur les choses (res en latin) et les droits per­son­nels, qui découlent d’un contrat entre des per­sonnes. La pro­prié­té est typi­que­ment vue comme un droit réel, qui cor­res­pond à une rela­tion entre deux termes : le pro­prié­taire et la chose possédée.

Crétois conteste cette vision : la pro­prié­té est for­cé­ment une rela­tion à trois termes : il faut ajou­ter “tous les membres de la socié­té” en 3e terme. Pour que la pro­prié­té fonc­tionne, il ne suf­fit pas qu’une per­sonne pré­tende avoir des droits sur une chose, il faut que toutes les autres per­sonnes recon­naissent cette situa­tion et aient l’o­bli­ga­tion de res­pec­ter les droits de ce propriétaire.

La dif­fé­rence entre un droit réel et un droit per­son­nel s’ef­frite. La pro­prié­té est elle aus­si le résul­tat d’un contrat, mais d’un contrat social. Elle n’est pas un droit naturel.

Un faisceau de droits

La pro­prié­té n’est d’ailleurs même pas un droit mono­li­thique. C’est un fais­ceau de droits : un ensemble plus ou moins arti­cu­lé de droits qu’on peut sépa­rer les uns des autres. Crétois cite Nozick, qui recon­naît cet état de fait.

C’est par exemple ce qui se passe en pro­prié­té intel­lec­tuelle, où l’au­teur peut sépa­rer le droit de dis­tri­buer son œuvre (qui va être loué ou ven­du à un dis­tri­bu­teur) de son droit moral ou d’autres droits liés à son œuvre.

Crétois cite l’i­dée de demok­te­sis, ima­gi­née par Nozick. Puisqu’on peut sépa­rer cer­tains droits du pro­prié­taire et les trans­fé­rer à d’autres gens, pour­rait abou­tir à une socié­té où tout le monde est co-pos­ses­seur de toutes les choses. Chacun aurait des droits sur les choses des autres et inver­se­ment. Le contrôle abso­lu sur une chose n’exis­te­rait plus. Cette situa­tion effraie Nozick, mais il est obli­gé d’ad­mettre qu’elle serait cohé­rente avec ses prin­cipes libertariens.

Crétois cite ensuite Honoré, qui liste une dizaine de droits par­ti­cu­liers qui sont recou­verts par ce qu’on appelle aujourd’­hui pro­prié­té. Un des apports de la sec­tion est d’i­ma­gi­ner qu’on puisse être pro­prié­taire sans avoir le droit de vendre son bien. ON peut l’u­ti­li­ser, l’ex­ploi­ter, mais pas le vendre.

Cette idée a été implan­tée un temps au Mexique. Pour empê­cher l’ap­pa­ri­tion d’un mar­ché fon­cier, les ter­rains n’é­taient pas ven­dables, seule­ment trans­mis­sibles à ses enfants. On évi­tait ain­si que des pro­prié­taires s’ap­pau­vrissent (à long terme) en ven­dant leur ter­rain pour un gain à court terme.

Si cette idée semble éton­nante pour les biens exté­rieurs, elle est banale pour le corps indi­vi­duel. Le prin­cipe d’in­dis­po­ni­bi­li­té du corps humain inter­dit de vendre ses organes, jus­te­ment pour ce genre de raison.

Enfin, le cha­pitre finit sur l’a­na­lyse d’une grille de lec­ture droit / pri­vi­lège / pou­voir / immu­ni­té, héri­té de Hohfeld. Et c’est imbi­table. C’est clair à la lec­ture, mais à résu­mer, pas aujourd’hui. 

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